Un tunnel guidé par l’intuition plutôt que par la «science»
CHRONIQUE / Dès les premières promesses du troisième maillon, nous avons attendu en vain des avis scientifiques, des études ou des preuves qui pourraient justifier un projet de cette envergure.
D’une annonce à l’autre, nous nous sommes dit que cela finirait par arriver.
Que vous ne pouvez pas démarrer une aventure aussi importante sans une base solide.
Mais à chaque fois, y compris l’annonce qu’il s’agira d’un tunnel, puis que ce tunnel passe de centre en centre, nous avons gardé l’appétit.
Nous parlons ici aujourd’hui de la forme du tunnel, de ses accès, du coût préliminaire et de l’emplacement probable de la première pelle de sol, mais il n’y a toujours pas de chiffres, d’études ou d’arguments améliorés.
Sauf peut-être celui de la sécurité publique. Si quelque chose de mauvais arrivait à l’un des ponts réels, nous aurions une alternative. Ne serait-ce que pour la circulation des véhicules d’urgence.
Pour le reste, il ne suffit pas de rentrer chez soi pour que le projet soit nécessaire. Il faut être capable de les convaincre avec un minimum de science.
L’argument du premier jour selon lequel une nouvelle liaison allégera la congestion des ponts repose toujours sur une base statistique faible.
Le ministère des transports a réalisé une «modélisation» de son propre pilote. Je promets d’examiner ces projections au fur et à mesure, mais cela reste une réalité incontournable: la grande majorité des usagers actuels du pont à l’heure de pointe du matin vivent à l’ouest de Lévis et de leur lieu de résidence. études, travail, magasinage) est situé dans la partie ouest du Québec.
Ceux qui ne sont pas intéressés à faire un détour d’un tunnel d’un centre à l’autre, que ce soit en voiture ou en transports en commun.
Néanmoins, il est évident qu’une trajectoire de centre à centre a une meilleure chance d’attirer qu’un lien excentrique vers l’est comme on le pensait au départ.
Pas de chiffres sur le nombre de véhicules ou de camions en transit du Saguenay ou de la Côte-Nord vers le Bas-Saint-Laurent. Cependant, cet argument continue d’être avancé pour justifier le troisième lien.
Le gouvernement a ignoré la hausse causée par la pandémie de télétravail dans ses simulations. Il parie que le trafic reviendra rapidement à son niveau antérieur et rappelle que la tendance forte est d’augmenter le nombre de voitures.
C’est plausible, mais cela aurait aidé à façonner cette intuition avec des chiffres.
Le premier ministre Legault a sans doute des raisons de croire que le tunnel Québec-Lévis «transformera la surface de la Capitale-Nationale», mais sommes-nous si certains que ce sera pour le mieux?
L’une des principales préoccupations soulevées par le projet de tunnel est celle de l’étalement urbain.
Tous les gouvernements et partis politiques disent vouloir l’arrêter, mais en fait, les rouleaux compresseurs continuent de broyer l’asphalte de plus en plus loin des centres d’emploi et des services publics.
L’entrée du tunnel est prévue en bordure du terrain agricole de Lévis.
Il n’est pas question de se développer en dehors du «périmètre d’urbanisation», assure le maire de Lévis Gilles Lehouillier.
« Nous travaillerons avec les différents acteurs pour faire en sorte qu’il n’y ait pas d’étalement urbain », a ajouté le ministre des Transports François Bonnardel.
Le Québec a «un grand territoire» et «il y a encore beaucoup de place pour le développement», a déclaré le premier ministre François Legault.
On en prend acte, mais on sait aussi l’effet que le pont Pierre-Laporte a eu sur le développement de la Rive-Sud et de la Beauce.
Un tunnel augmentera nécessairement la pression sur les terres agricoles pour les décennies à venir. Ceux qui promettent aujourd’hui que cela n’arrivera pas ne seront pas là demain et le lendemain pour tenir le fort.
Le gouvernement de la CAQ ne le cache pas. L’un des objectifs de ce tunnel est de stimuler le développement économique dans la partie orientale du territoire.
Il faut corriger «l’erreur» en plaçant le pont Laporte près du pont de Québec, plutôt qu’à l’est.
Je crois comprendre qu’aucune étude n’a été menée pour mesurer l’impact possible du tunnel sur l’étalement urbain.
Aucune étude non plus sur le développement économique de l’est du Québec, qui continue d’être associé à un tunnel Québec-Lévis.
J’avais cité dans une chronique précédente une étude du chercheur à l’INRS Mario Polèse. Il a montré que les nouvelles autoroutes vers les petites villes favorisent la décentralisation des industries qui iront là où la terre est la moins chère.
Au contraire, l’autoroute a favorisé la centralisation des échanges. Les citoyens de la périphérie éloignée ont alors préféré venir faire leurs achats en ville, où il y a plus de choix, plutôt que dans leur quartier.
Si nous voulons encourager le développement vers Bellechasse, Montmagny et vers l’Est, il serait bon de préciser exactement ce que nous voulons. Et ce que nous ne voulons pas. Cela suggère un minimum de non-analyse.
Le gouvernement Legault a opté pour sa présentation publique reliant le projet de tunnel à trois autres projets de transport en commun: un tramway, des voies réservées aux couronnes du Québec et une liaison avec la Rive-Sud.
Le résultat est assez impressionnant. Ici, nous voulons saluer la cohérence et la vision globale.
Tous les citoyens de la grande région de Québec auront accès à de meilleurs transports en commun.
Il jette également les bases d’une éventuelle intégration complète des réseaux de transport sur les deux rives. Cela n’a pas de sens?
Cependant, de nombreux détails restent à joindre. Sur le tunnel, il émerge du côté nord, en particulier.
Le gouvernement a écouté la ville et a accepté de reporter la sortie du tunnel à ExpoCité plutôt qu’au cœur de St-Roch. Il est heureux. Cela transformera la partie sud de l’autoroute actuelle en boulevard urbain et la qualité de vie au centre-ville en profitera.
Il s’agit d’une amélioration importante et essentielle pour le projet.
Cependant, le MTQ vient de sortir un lapin de son chapeau en ajoutant une liaison entre le tunnel et l’autoroute Dufferin-Montmorency.
Les automobilistes l’utiliseront pour ensuite regagner le centre-ville, ce qui augmente le trafic et peut-être de nouveaux embouteillages.
Si l’objectif est vraiment de convaincre les citoyens de prendre le transport en commun, pourquoi cet accès?
Cela va à l’encontre de la tendance qui consiste à supprimer l’infrastructure routière des centres-villes au lieu de l’enrichir.
En fait, c’est la route sous-marine que tous les groupes environnementaux défient. Ils croient que cela favorisera l’étalement urbain et finira par aggraver les problèmes de congestion au lieu de les résoudre. Ces groupes s’appuient sur des recherches et des analyses scientifiques.
Pendant ce temps, le même MTQ reste avec la connexion de transport en commun à Lévis pour économiser de l’argent.
Logiquement, ils veulent une station de transfert sur le campus Desjardins. Les voyageurs arrivant en bus sur le boulevard Guillaume-Couture peuvent s’y connecter directement à la ligne de mini bus.
Cela impliquerait de forer un puits d’accès sous la station et d’y installer un ascenseur.
Trop cher, il a été jugé. Nous demanderons plutôt aux voyageurs de Guillaume-Couture de faire un détour par l’autoroute 20 afin d’avoir accès à la connexion sous la rivière.
Rendre la vie du transport en commun difficile ne convainc pas les citoyens de le prendre.
Je sais qu’il doit y avoir une limite quelque part, mais nous parlons d’un projet qui coûtera certainement 10 milliards de dollars et que nous voulons pendant 100 ans. Pourquoi tricher pour une station?
La CAQ tient pour acquis que les citoyens de la région de Québec l’ont votée en raison de sa promesse d’une troisième caution.
Elle semble croire que cela l’aidera à montrer à quel point cette connexion est si nécessaire au développement économique de la région et à la lutte contre la congestion des heures de pointe sur les ponts.
Nous comprenons que la CAQ doit tenir sa promesse électorale.
Mais il y a aussi des citoyens qui ont voté CAQ malgré la promesse du troisième maillon. Ils voulaient se débarrasser des libéraux et parier que le projet ne pouvait pas se permettre les coûts, l’impact et l’analyse du bon sens. Eux et d’autres veulent une meilleure démonstration du «pourquoi» au «quoi», du «comment» et des dessins d’artistes.
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